La Vérité se Murmure sous la couette

Art Moderne Contemporain Numérique, Modern Contemporary Digital Art
EnglishFrenchGermanItalianPortugueseRussianSpanish
Aller au contenu

La Vérité se Murmure sous la couette

Ata Gallery - Peinture Numérique - Digital Painting
Publié par Ata Irvani dans Expressions Persanes · 16 Mars 2025
Tags: VéritéExpressionsPersanes
La Vérité se Murmure sous la couette

Il fut un temps, dans un royaume lointain, où régnait un monarque despotique, ivre de son propre pouvoir. Aussi sévère que vaniteux, il n’avait que peu d’intérêts en dehors du faste et du jeu d’échecs, une passion qui occupait ses jours et enflait son orgueil. Dans chaque banquet, parmi les mets raffinés et les courtisans obséquieux, un échiquier trônait en son honneur.

Le roi, persuadé d’être un stratège hors pair, affrontait les plus habiles joueurs du royaume. Et pourtant, tous s’inclinaient devant lui, non par talent, mais par crainte. Nul n’osait le vaincre, car il ne souffrait pas l’affront de la défaite. Ainsi, chaque partie était une mise en scène où la victoire lui revenait toujours, et son arrogance, nourrie d’illusions, grandissait sans fin.

Seul un homme osait encore braver les règles tacites de cette cour emmurée dans la flatterie : le fou du roi. Lui seul pouvait rire des travers du souverain sans craindre le courroux royal. Sa mission n’était pas seulement de divertir, mais aussi de révéler, sous le masque du comique, les vérités que nul n’osait dire.

Un jour, alors que l’ennui pesait sur le roi comme un manteau de plomb, il convoqua son fou et lui lança avec dédain :

— Viens donc, jouons une partie d’échecs.

Le bouffon, esquissant un sourire mutin, répondit :

— À une condition.

Le roi haussa un sourcil.

— Et quelle est-elle ?

— Si vous perdez, Majesté, point de colère ni de tricherie.

Le souverain éclata de rire :

— Moi, perdre ? Contre toi ? Un bouffon sans talent ni envergure ? Les plus grands joueurs se sont inclinés devant moi, et tu oses prétendre pouvoir me battre ?

Le fou inclina la tête.

— L’échiquier est là, Majesté. Que les pièces parlent pour nous.

Ils entamèrent la partie. Très vite, le roi comprit que l’issue ne serait pas celle qu’il imaginait. Pris dans la toile d’un jeu qu’il croyait maîtriser, il vit ses mouvements se réduire, sa marge de manœuvre s’effondrer. Puis, le fou éclata de rire et, d’un geste léger, annonça :

— Échec et mat, Majesté !

Rouge de rage, le roi balaya l’échiquier d’un revers furieux, projetant les pièces au visage de son adversaire. Celui-ci, en se protégeant, gémit :

— N’avais-je pas dit que vous ne sauriez accepter votre défaite ?

Le roi, conscient de son emportement, se redressa, cherchant à retrouver sa contenance.

— Cette partie n’était pas valable ! rétorqua-t-il. Je ne savais pas que tu savais jouer. Reprenons, et cette fois, tu verras qui je suis vraiment.

Le fou, sans se départir de son sourire, déclara :

— À deux conditions.

— Parle !

— Premièrement, si vous perdez, vous l’admettrez sans chercher d’excuses. Deuxièmement, si je vous bats à nouveau, vous proclamerez devant toute la cour que vous avez été vaincu, deux fois, par votre propre bouffon.

Le roi, piqué dans son orgueil, accepta. Cette fois, il calcula chaque mouvement, réfléchit longuement avant de toucher une pièce, et pourtant… rien n’y fit. Pas à pas, le fou le menait vers une nouvelle déroute.

À la toute fin de la partie, alors que l’inévitable se dessinait, le bouffon, dans un geste inattendu, abandonna l’échiquier, courut vers un coin de la salle et se glissa sous une lourde couverture.

Interloqué, le roi le suivit :

— Que fais-tu donc, insensé ? Le jeu n’est pas fini ! Reviens !

Sous la couette, la voix étouffée du fou répondit :

— Je ne bougerai pas, Majesté.

— Pourquoi ?

— Parce que j’ai une vérité à vous dire.

— Une vérité ? Alors parle ! Mais cesse donc ces enfantillages et montre-toi.

Le fou secoua la tête sous le tissu :

— Non, Majesté, il est des vérités qui ne se disent qu’à l’abri des regards, là où les pièces d’échecs ne peuvent plus voler.

Le roi, troublé, marqua un temps. Puis, d’une voix plus posée, il ordonna :

— Soit, dis ta vérité.

Un silence se fit. Puis vint la sentence, implacable et légère à la fois :

— Échec et mat, Majesté.

Le roi se retourna précipitamment vers l’échiquier. Il était trop tard. Il avait perdu. Et cette fois, aucune colère, aucun jet de pièces ne pouvait y remédier. Car la vérité, aussi implacable que le jeu, venait d’être prononcée.

Et sous sa couette, le fou riait doucement.

-------------------------------------------------------------------------

Usage du proverbe
Depuis ce temps-là, chaque fois que les circonstances ne permettent pas de dire la vérité ouvertement, les gens plaisantent en disant : « La vérité doit se dire sous la couverture. »

-------------------------------------------------------------------------

L'équivalent français
L'équivalent français du proverbe persan « حرف حق را باید زیر لحاف گفت » pourrait être :

  • « Il faut tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler. » (pour souligner la nécessité de prudence avant de dire une vérité risquée).
  • « La vérité n'est pas toujours bonne à dire. » (pour insister sur le danger de dire certaines vérités).
  • « Toute vérité n'est pas bonne à dire. » (expression classique française qui reflète bien l'idée du proverbe persan).
  • « Mieux vaut se taire que de dire une vérité qui fâche. » (formulation plus explicite de l’idée).

Ces expressions traduisent bien l'idée qu'il n'est pas toujours prudent de dire la vérité ouvertement et qu'il faut parfois la cacher ou la murmurer dans des circonstances défavorables.





Il n'y a toujours pas des critiques.
0
0
0
0
0
Retourner au contenu